La santé des musiciens a longtemps été un mystère. Les médecins ont commencé à écouter le corps à la recherche de signes de perte de langage. Une enquête sur un problème de santé lié au travail qui refuse d’être nommé.
Les rythmes de vie et de précarité fatigue le corps
Comme il ne connaît que les stars, le grand public ignore qu’un grand nombre de musiciens en France remplissent des salles de moins de 400 places, comme le groupe qu’accompagne Catherine. Il n’a aucun doute sur ce qui se passe derrière le rideau. Pas plus tard qu’en septembre, le collectif CURA a apporté un éclairage sur cette réalité lors d’un événement intitulé « L’industrie musicale française est-elle en bonne santé ? ».
Les résultats d’une enquête préliminaire menée auprès de 503 personnes, artistes et membres de l’entourage professionnel, ont été révélés. Quatre personnes sur cinq qui écoutent des « musiques actuelles » (rap, pop, rock, jazz…) sont anxieuses, et une personne sur quatre est dépressive, un ratio 2,5 fois supérieur à celui du reste de la population française. En cause, un rythme de vie déséquilibré et une situation financière précaire qui use le corps et l’esprit des gens.
Selon les recherches, nous pourrions être confrontés à une mort précoce
Le Dr André-François Arcier a été un pionnier dans le domaine de la médecine psychiatrique pour les artistes avec son association à but non lucratif, la Médecine des Arts, et sa clinique spécialisée, la Clinique du Musicien. Il souligne que les principaux dangers pour les musiciens sont les « syndromes de surmenage » qui affectent le corps.
Un type de syndrome de surmenage est appelé « syndrome de surmenage non spécifique », et il correspond à des douleurs musculaires. Dans des contextes qui ne sont pas confortables pour leurs articulations, ils sont attachés à des gestes répétitifs. C’est le risque le plus important dans la musique classique et contemporaine, qui représente désormais la moitié de nos consultations, dit-il.
La prévalence de l’abus d’alcool et de drogues est difficile à évaluer dans une société où les rencontres sociales sont monnaie courante. Le Dr Arcier rappelle que les études anglo-saxonnes ont montré des signes précoces de décès, « avant 30 ans » et « vers 50 ans ».
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« Un problème de riches »
Karine Huet, secrétaire du SNAM-général CGT, constate qu’il n’y a pas « beaucoup de musiciens retraités » et que depuis 40-50 ans, de nombreux artistes ont quitté la scène pour travailler en studio.
» Le musicien dont nous parlons est sporadique. Des années 1970 aux années 1980, il a bénéficié d’une garantie de chômage, et il a reçu une formation professionnelle dans les années 1980. Aujourd’hui, il n’y a toujours pas de retraite, mais le système s’est construit de décennie en décennie, de sorte que nous pouvons nous rapprocher du salaire moyen d’une personne qui fait partie du régime général.
Même parmi leurs pairs, les musiciens abordent rarement le sujet de la santé et de la sécurité au travail. Leur problème porte plutôt sur la déclaration exacte de leurs heures de travail. En d’autres termes, nous dépendons d’une espèce qui peut survivre. Karine Huet poursuit : « La santé au travail est presque un problème de richesse dans ce milieu. »
Pourtant, à la mi-novembre à Madrid, la Fédération internationale des musiciens (Fim), qui regroupe des syndicats de musiciens du monde entier, a organisé une conférence sur la santé des musiciens. Plutôt que de se concentrer sur les musiciens, ces réunions étaient axées sur la prévention de la perte d’audition, l’importance du sommeil ou la dystonie de fonction, une contraction des muscles qui interfère avec le mouvement d’un instrument.